Une visite coquine à prix d’or

Monsieur X admet s’être rendu sur un site érotique mais conteste avoir accepté de conclure un abonnement avec le prestataire. Il mentionne par ailleurs que la plupart des SMS reçus étaient en allemand, langue qu’il ne comprend pas. Y SA indique que le client aurait activé le service lié aux numéros court XXX et XXY depuis son site internet mobile et qu’il aurait ensuite cliqué sur une vidéo présente sur le site et envoyé un SMS afin d’activer les services. L’Ombudsman estime que l’envoi d’un SMS pré formulé au numéro court correspondant n’est pas suffisant au regard de la loi. L’Ombudsman remarque également que la manière de désactiver le service ne figure pas sur le relevé fourni par le prestataire et regrette que la plupart des SMS aient été envoyés en langue allemande ainsi qu’en dialecte. Par ailleurs, l’Ombudsman constate que des SMS de publicité ont été facturés au client, ce qui est contraire aux dispositions légales en vigueur. Partant, l’Ombudsman constate que les services de Y SA n’ont pas été valablement activés, à mesure que le client n’a pas expressément donné son consentement pour l’activation des services et que les informations au sujet de la manière de les désactiver font défaut. L’Ombudsman propose dès lors le remboursement intégral de la somme contestée.

PROPOSITION DE CONCILIATION

En date du 5 février 2018, l'Ombudsman a introduit une procédure de conciliation entre les parties. A cet égard, il a examiné la demande du client ainsi que l’ensemble des documents qui lui ont été soumis et a prié le prestataire concerné de lui faire parvenir sa prise de position. Après avoir examiné les faits mentionnés par les parties et les documents mis à sa disposition, l’Ombudsman peut soumettre la présente proposition de conciliation.

La proposition de conciliation suivante prend en compte aussi bien les arguments du client que ceux du prestataire. Des motivations juridiques ne sont également avancées que si nécessaires. Seuls les points essentiels de la demande de conciliation et de la prise de position du prestataire seront pris en considération. L’Ombudsman ne peut pas examiner les arguments des parties comme un tribunal le ferait.

A. EXPOSÉ DES FAITS SELON LA DEMANDE DE CONCILIATION

Monsieur X présente sa demande de conciliation comme suit:

« En date du 2 septembre 2017, j’ai visité un site érotique avec mon portable. Selon mes souvenirs, j’ai répondu que j’avais plus de 18 ans.

La société Y AG m’a collé un abonnement !

Je n’ai rien signé et je n’ai rien accepté valablement.

Le nom de Y AG n’a jamais figuré sur l’écran de mon portable.

Je ne parle pas du tout allemand alors que 80% des messages reçus étaient en allemand.

Je demande le remboursement de CHF 342.70 dans sa totalité. Ce montant a déjà été payé à Z SA le 20.12.2017. »

B. PRISE DE POSITION DU PRESTATAIRE

Dans sa prise de position, Y AG s'exprime comme suit:

« L'utilisateur du numéro no. 07x xxx xx xx a souscrit le 02.09.2017 à 16:21:33 une vidéo abonnement par le site mobile v.xxx.ch.

Un deuxième abonnement a été souscrit le 09.09.2017 à 17:41 par le numéro premium 648.

Suite à des frais que nous avons aussi reçu par l'opérateur, nous voudrions être d'accord avec un remboursement à Monsieur X de total CHF 290.-. »

C. CONDITIONS DE RECEVABILITÉ

Conformément à l'art. 12c de la Loi du 30 avril 1997 sur les télécommunications (LTC) (RS 784.10) et à l'art. 43 al. 1 de l'Ordonnance du 9 mars 2007 sur les services de télécommunication (OST) (RS 784.101.1), l'Organe de conciliation des télécommunications est compétent pour les litiges relevant du droit civil entre les client(e)s et les fournisseurs de services de télécommunications et les fournisseurs de services à valeur ajoutée. Les conditions de recevabilité pour la procédure de conciliation sont régies à l'art. 45 al. 2 OST ainsi qu'à l'art. 8 du Règlement de procédure et portant sur les émoluments de l'Organe de conciliation des télécommunications. Les demandes de conciliation doivent être accompagnées du formulaire dûment rempli prévu à cet effet. La partie requérante doit rendre crédible avoir tenté, durant les 12 derniers mois, par écrit et sans succès, de chercher une solution amiable auprès de l'autre partie au litige. En outre, la requête en conciliation ne doit pas être déposée à des fins manifestement abusives et le différend en question ne doit pas être porté devant un tribunal ou un tribunal arbitral.

Monsieur X a adressé deux lettres de contestation à Y AG, le 9 et le 22 novembre 2017.

Par courrier du 13 décembre 2017, Y AG a indiqué les services que Monsieur X avait activés. Le prestataire a mentionné que la souscription s'était effectuée par une première étape au numéro 613, par lequel le client avait indiqué le mot-clé "OK". Puis, par le numéro 648, l'abonnement de CHF 5.- par jour aurait également été confirmé. Il a mentionné que pendant des semaines, le client avait reçu des SMS qu'il avait pu lire et qu'il ne s'était pas désinscrit. Il a confirmé que Monsieur X avait bel et bien commandé des services érotiques par le biais de ses numéros courts. Il a invité le client à bien vouloir vérifier ces informations et a indiqué que si le client avait une proposition constructive, il devait la lui faire savoir.

Par lettre recommandée du 10 janvier 2018, le client a proposé que le prestataire lui rembourse CHF 300.- et qu'il prendrait à sa charge CHF 42.70. 

Par correspondance du 12 janvier 2018, Y AG a requis une copie des factures litigieuses, ainsi que le nom, le prénom du client et le numéro concerné. 

Par courrier du 15 janvier 2018, Monsieur X a mentionné que ces documents avaient déjà été transmis à deux reprises mais les a envoyés à nouveau.

Monsieur X a indiqué ne pas avoir reçu de réponse.

En l'espèce, Monsieur X a démontré de manière crédible avoir essayé de trouver un accord avec Y AG, sans succès.

Ainsi, les conditions de recevabilité étant remplies, l'Ombudsman est compétent pour traiter de l'affaire et tenter de trouver une solution amiable au différend qui lie les parties en cause.

D. CONSIDÉRATIONS DE L'OMBUDSMAN

1. Situation et problématique

Le présent litige repose sur le fait que Monsieur X conteste la conclusion d’un abonnement auprès Y AG.

Y AG a estimé, de son côté, que deux abonnements ont été valablement conclus mais a proposé le remboursement de CHF 290.-. Le solde serait donc à la charge de Monsieur X.

Dès lors, l’Ombudsman analysera l’état de fait ainsi que les éléments de droit et proposera une solution aux parties.

2. Généralités

Préalablement, l'Ombudsman tient à préciser quelques points généraux au sujet des services commerciaux de SMS et MMS. Ces services sont mis à disposition de différentes manières, introduits généralement par des services payants, particulièrement lorsqu'ils sont en relation avec des vidéos, des sonneries, des concours, des forums de discussion (chat).


Afin de s'abonner à un tel service, le client doit envoyer un code à un numéro déterminé. Chaque fois qu'une nouvelle information est disponible, il reçoit un ou plusieurs SMS ou MMS, généralement payant(s). Si le client ne souhaite pas recevoir d'autres messages de ce genre, il lui faut désactiver le service, en envoyant un message avec un code de désactivation spécifique, tel que « STOP » ou « STOP ALL ». Les tarifs varient en principe entre CHF 0.10 et CHF 10.- par message. La loi fixe le prix maximum pour l'ensemble des messages reçus dans la même minute à CHF 5.-. En outre, un abonnement à un service SMS ou MMS ne peut pas dépasser la somme de CHF 400.- par communication ou par inscription. Les fournisseurs de services à valeur ajoutée sont compétents pour la mise à disposition de ces prestations, ce qui est le cas en l'espèce de Y AG. En revanche, les opérateurs de téléphonie mobile, soit en l’espèce Z SA, sont compétents pour la transmission au client final des SMS ou MMS sur le réseau mobile ainsi que pour la facturation.

Avant l'activation d'un service qui peut avoir pour conséquence la réception de plusieurs SMS ou MMS, le consommateur doit être informé, gratuitement et d'une manière compréhensible, d'une éventuelle taxe d'abonnement, du prix par information unique, de la procédure de désactivation du service et du nombre maximal d'informations uniques par minute. Une fois que le consommateur a reçu ces informations, il doit encore expressément confirmer l'acceptation de l'offre. Dans la plupart des cas, le client ne paie pas pour l’envoi d’un message, mais pour la réception de celui-ci. Ainsi, chaque fois qu’il contracte un abonnement, il reçoit périodiquement les prestations qu’il a commandées via son téléphone portable. Des frais relativement conséquents sont générés par la réception de ces prestations. 

Les opérateurs de téléphonie mobile doivent offrir gratuitement à leurs clients la possibilité de bloquer les SMS et MMS provenant de numéros courts. Le blocage peut concerner tous les numéros courts ou seulement ceux qui commencent avec le chiffre 6 et qui sont réservés à des offres érotiques.


L'Ombudsman constate que le numéro 613 a été attribué à la société Y AG par Z SA. Dès lors, la société Y AG est bien le fournisseur des prestations utilisées sur le raccordement de Monsieur X (07x xxx xx xx).

3. Activation des services et validité du contrat

Dans sa prise de position, Y AG a indiqué que Monsieur X aurait activé le service lié aux numéros 613 et 648 depuis le site internet mobile www.v.xxx.ch. Monsieur X aurait ensuite envoyé un SMS aux numéro 613 et 648 afin de valider un abonnement à des vidéos réservées aux adultes. Monsieur X a affirmé n’avoir aucunement requis de tels services.

Les services ont été facturés pour un montant total de CHF 342.70 (CHF 253.30 facturés le 10 octobre 2017 et CHF 89.40 facturés le 10 novembre 2017).

L’Ombudsman a reproduit les manipulations décrites dans la prise de position de Y AG. L’Ombudsman s’est rendu sur la page internet mobile www.v.xxx.ch. Il a ensuite cliqué sur une vidéo présente sur le site. La page d’envoi des SMS s’est ouverte avec le contenu à envoyer suivant : « OK PLAY Video. Ja ich bin min 18 Jahre alt und will jetzt Video 535761 starten. Help 0218230195 CHF 19.60/Woche +4G v.www.ch/info.html Klicke jetzt SENDEN ». Le client n’avait donc qu’à envoyer le SMS généré automatiquement dans la boîte d’envoi des SMS. Par contre, le numéro court était le 665 et non le 613 ou le 648. Il est possible que le numéro court ait changé depuis septembre 2017. L’Ombudsman a envoyé le message au 665. Il a ensuite reçu un SMS avec la mention « Zugang zu Video-Archiv 535761 freigeschaltet. Ende STOP SPRITZD an 665 – Help0848111484 – Viel Spass ! ».

L’Ombudsman a vérifié le relevé de compte du fournisseur de services de télécommunication et a constaté que le service a été facturé CHF 0.60 pour trois SMS reçus.

Selon l’art. 11b al. 1 de l’Ordonnance sur l’indication des prix (RS 942.211 OIP) (« lorsqu'un consommateur recourt à une prestation de service au sens de l'art. 10, al. 1, let. q, qui requiert une inscription préalable et qui peut impliquer la transmission de plusieurs unités d'informations (push-services), telles que textes, images ou séquences audio ou vidéo, il doit être informé gratuitement et clairement, à l'endroit où l'offre est proposée et sur l'installation terminale mobile, avant l'activation du service: b

  • a. de la taxe de base qui sera éventuellement perçue;
  • b. du prix à payer par unité d'information;
  • c. de la manière de procéder pour désactiver le service;
  • d. du nombre maximum d'unités d'informations par minute. »)

L’Ombudsman est d’avis que l’envoi d’un SMS pré formulé au numéro court n’est pas suffisant au regard de l’art. 11b al. 2 de l’Ordonnance sur l’indication des prix (RS 942.211 OIP.) L’Ombudsman remarque qu’autant le site internet que les SMS à envoyer et reçus sont en allemand, voire en dialecte alémanique pour le numéro 648, alors que Monsieur X parle français. Selon le fichier Excel, le client aurait reçu les SMS du numéro 613 en français mais les informations sur le prix des SMS ne sont pas indiquées (art. 11b al. 1 let. A). Le fichier Excel mentionne également le contenu des SMS que le client aurait reçus des numéros 613 et 648. L’Ombudsman constate clairement que la manière de désactiver le service ne figure nulle part (art. 11b al. 1 let C OIP).

Par ailleurs, l’Ombudsman constate que des SMS de publicité envoyés par le numéro 648 pour d’autres services (par exemple pour le numéro 625) ont été facturés à Monsieur X (CHF 5.- par SMS). Ces SMS sont rédigés en dialecte alémanique alors que le client parle français. Cela signifie que les informations au sujet des services que Monsieur X pourrait éventuellement souscrire lui ont été facturés. Pourtant l’art. 11b al.2 OIP précise que « les taxes ne peuvent être prélevées qu'après que le consommateur a eu connaissance des informations visées à l'al. 1 et qu'il a expressément confirmé sur son installation terminale mobile qu'il acceptait l'offre. ». Monsieur X n’a jamais activé les services du numéro 625. L’Ombudsman constate donc que les SMS publicitaires ont été facturés au client.

Au vu de ce qui précède, l’Ombudsman estime que le prestataire ne respecte pas les prescriptions légales en vigueur, soit l’art. 11b de l’Ordonnance sur l’indication des prix (RS 942.211 OIP).

Au vu de la situation, l’Ombudsman estime que Y AG devrait rembourser la totalité des montants facturés liés au numéro 613 et 648, soit CHF 342.70.

4. Conclusions

L’Ombudsman constate que Y AG n’a pas respecté les dispositions légales, notamment l’art. 11b OIP, dans le cas d’espèce. En effet, le client n’a pas expressément donné son consentement pour l’activation des services lié au site internet www.v.www.ch et les informations sur le prix des services et sur la manière de désactiver les services surtaxés manquent.

L’Ombudsman estime que Y AG devrait rembourser la totalité des montants facturés pour les services liés aux numéros courts 613 et 648 sur le compte bancaire de Monsieur X, soit CHF 342.70.

Dans le cas où la présente proposition de conciliation a été exécutée totalement ou partiellement avant la signature des deux parties, l'accord est rempli en ces points. Dès lors, les droits et obligations en découlant s'éteignent.

E. PROPOSITION DE CONCILIATION

  1. Y AG rembourse à Monsieur X le montant de CHF 342.70 sur son compte bancaire ou postal, indiqué au point 2 de la présente convention, dans les 20 jours suivant la réception de la présente convention dûment signée par les deux parties et l’Ombudsman.
  2. Monsieur X fournit, en même temps que la présente convention de conciliation signée, les données de son compte bancaire ou postal à l'Organe de conciliation ombudscom, qui les remettra à Y AG (...)
  3. Les parties acceptent la présente proposition de conciliation absolument sans contrainte.

Berne, le 28 mars 2018

Dr Oliver Sidler
Ombudsman