Mieux vaut pas deux fois qu'une

Un proche du client Monsieur X, a activé par mégarde une option payante fournie par un partenaire de Y SA. Le prestataire accepté d’annuler la commande. Monsieur X a malencontreusement activé une seconde fois ces mêmes services avec sa télécommande, quelques jours plus tard. Cette fois, le prestataire a refusé d’annuler l’abonnement pour cette option payante. L’Ombudsman a constaté que le client n’était pas conscient de l’activation du service et ne l’a pas souhaité. Il n’a émis aucune manifestation de volonté pour conclure l’option payante supplémentaire. L’Ombudsman estime que le contrat pour l’option supplémentaire est nul et non avenu pour défaut de volonté de Monsieur X.

PROPOSITION DE CONCILIATION

En date du 14 mars 2022, l'Ombudsman a introduit une procédure de conciliation entre les parties. A cet égard, il a examiné la demande du client ainsi que l’ensemble des documents qui lui ont été soumis et a prié le prestataire concerné de lui faire parvenir sa prise de position. Après avoir examiné les faits mentionnés par les parties et les documents mis à sa disposition, l’Ombudsman peut soumettre la présente proposition de conciliation. La proposition de conciliation suivante prend en compte aussi bien les arguments du client que ceux du prestataire. Des motivations juridiques ne sont également avancées que si nécessaires. Seuls les points essentiels de la demande de conciliation et de la prise de position du prestataire seront pris en considération. L’Ombudsman ne peut pas examiner les arguments des parties comme un tribunal le ferait.

A. EXPOSÉ DES FAITS SELON LA DEMANDE DE CONCILIATION

Monsieur X présente sa demande de conciliation comme suit:

« Le 12.02.2022 par erreur, mon petit neveu a appuyé sur la télécommande TV et j’ai reçu sur mon e-mail une info comme quoi je suis abonné à A, CHF 55.-/mois. Le 15.02.22, j’ai demandé la rétractation de cet abonnement et A SA a été d’accord. Le jour du 28, l’erreur s’est répétée de ma part et cette fois, A SA m’a répondu qu’il n’entre pas en matière et a refusé d’annuler mon abonnement.

Après 4 conversations téléphoniques avec eux, je m’adresse à vous.

  1. Le contrat est entre Monsieur X et Y SA, je ne reconnais pas A SA. Ce tiers a été introduit par Y SA sans mon avis.
  2. Le contrat avec A SA ne peut pas être résilié avant une année (12 mois) ! Donc je dois payer CHF 55.- x 12 mois. Abus de confiance. Illégal. Ça n’existe pas dans le code des obligations suisse. SVP, je vous demande d’intervenir auprès de A SA (ou Y SA ?) pour la résiliation immédiate de cet abonnement que je n’ai pas besoin, j’ai 84 ans. Mes préoccupations sont différentes de regarder des films ciné +.
  • Je suis d’accord de payer les CHF 20.- de l’émolument.
  • à la limite, je suis d’accord de payer un mois de cet abonnement de CHF 55.-/mois, en tout cas pas plus.
  • J’ai parlé 3 fois avec Y SA et ils me disent de prendre contact avec A SA, mail du 05.03.22. »

B. PRISE DE POSITION DU PRESTATAIRE

Dans sa prise de position, Y SA s'exprime comme suit :

« Le 12 février 2022 à 7h19, Monsieur X, ou un membre de sa famille, a commandé via la télécommande l’option de A SA à CHF 39.- durant 12 mois puis CHF 55.- après la 1ère année de promotion. Cette commande a été confirmée par mail à Monsieur X (copie envoyée par mail). Le 14 février, Monsieur X a appelé notre service clients pour résilier l'option de A SA. Notre collaborateur lui a confirmé que les frais de résiliation anticipée se montaient à CHF 654.58. Nous avons bien expliqué à Monsieur X que cet abonnement était assuré par un fournisseur tiers et que ce sont les conditions de ce fournisseur qui font foi. Notre collaborateur a conseillé à Monsieur X d'appeler directement A SA pour négocier la résiliation sans frais de leur abonnement. En cas de demande de résiliation, A SA décide si l'abonnement peut être résilié prématurément et si les frais seront crédités. A SA transmet ensuite les demandes de résiliation de manière groupée à Y SA. Le 16 février, A SA nous ont communiqué qu'ils acceptaient à titre exceptionnel de renoncer aux frais de non-respect de la durée contractuelle ordinaire de CHF 654.58. A SA fait preuve de compréhension la première fois qu'un client les appelle directement et qu'il leur signale qu'il a commandé la prestation par erreur. Le 28 février 2022 à 11h19, Monsieur X, ou un membre de sa famille, a commandé via la télécommande l’option de A SA à CHF 39.- durant 12 mois puis CHF 55.- après la 1ère année de promotion. Cette deuxième commande a été confirmée par mail à Monsieur X. Là encore, il a contacté A SA pour leur demander de renoncer aux frais de résiliation anticipée pour non-respect de la durée contractuelle de 12 mois. A SA a clairement refusé la résiliation prématurée et d'annuler une seconde fois les frais de CHF 654.58. Ils nous ont demandé de résilier l’option de A SA à CHF 39.-/mois à l'échéance du contrat, soit pour le 28.02.2023. Nous vous rappelons le point 3. Prestations du client de nos conditions générales : Le client est responsable de toute utilisation de ses raccordements, y compris de celle effectuée par des tiers. En particulier, il est tenu de payer tous les montants facturés par suite de l’utilisation des prestations. Ceci s’applique également aux marchandises ou aux prestations qui ont été acquises ou commandées par l’intermédiaire de ses raccordements. Si le client met à la disposition d’enfants mineurs les prestations assurées par Y SA, il est responsable du respect de la législation sur la protection des mineurs. Dans le cadre des possibilités techniques, Y SA met à disposition des éventualités de verrouillage. Y SA n'a pas commis d'erreur de traitement lors des commandes faites les 12 et 28 février 2022 et nous n'irons pas à l'encontre de la décision de A SA. »

C. CONDITIONS DE RECEVABILITÉ

Conformément à l'art. 12c de la Loi du 30 avril 1997 sur les télécommunications (LTC) (RS 784.10) et à l'art. 43 al. 1 de l'Ordonnance du 9 mars 2007 sur les services de télécommunication (OST) (RS 784.101.1), l'Organe de conciliation des télécommunications est compétent pour les litiges relevant du droit civil entre les client(e)s et les fournisseurs de services de télécommunications et les fournisseurs de services àvaleur ajoutée. Les conditions de recevabilité pour la procédure de conciliation sont régies à l'art. 45 al. 2 OST ainsi qu'à l'art. 8 du Règlement de procédure et portant sur les émoluments de l'Organe de conciliation des télécommunications. Les demandes de conciliation doivent être accompagnées du formulaire dûment rempli prévu à cet effet. La partie requérante doit rendre crédible avoir tenté, durant les 12 derniers mois, par écrit et sans succès, de chercher une solution amiable auprès de l'autre partie au litige. En outre, la requête en conciliation ne doit pas être déposée à des fins manifestement abusives et le différend en question ne doit pas être porté devant un tribunal ou un tribunal arbitral.

Par courriel du 12 février 2022, Y SA a confirmé l'activation de A SA.

Par courriel du 14 février 2022, Monsieur X a contesté l'activation accidentelle de l'abonnement à A SA et en a requis l'annulation.

Par courriel du 15 février 2022, A SA a accepté la résiliation sans frais de l'abonnement. Le prestataire a précisé que pour éviter une activation par accident à l'avenir, il lui suggérait d'activer un code PIN pour sa box fournie par Y SA.

Par courriel du 28 février 2022, Y SA a confirmé l'activation du service de A SA en date du 28 février 2022.

Par courriel du 28 février 2022 à A SA, Monsieur X a requis l'annulation de l'abonnement de A SA activé accidentellement avec sa télécommande en date du 28 février 2022.

Par courriel du 1er mars 2022, A SA a estimé qu'une erreur de télécommande a déjà été effectuée le 12 février 2022 et a refusé une résiliation immédiate et sans frais.

Par courriel du 5 mars 2022, Y SA a estimé que les demandes de résiliation doivent être adressées à A SA et que si cette dernière refuse la résiliation sans frais, Y SA ne peut rien faire.

L'Organe de conciliation a examiné les documents fournis, y compris les factures et les justificatifs des communications, et n'a pu établir un quelconque caractère manifestement abusif de la demande au sens de l'art. 45 al. 2 OST. S'il s'avère que le but réel que cherche à atteindre le requérant par le biais de sa demande n'a aucun rapport direct avec le cadre instauré par le Règlement de procédure et portant sur les émoluments, la demande doit être considérée comme étant manifestement abusive. Le but ou l'utilité de la procédure de conciliation pour la partie requérante doit être atteint par la procédure de conciliation dans le cadre fixé par le Règlement de procédure et portant sur les émoluments. A priori, il n'y a pas de caractère abusif manifeste d'une demande de conciliation portant sur des appels et autres services contestés figurant sur la facture et sur les justificatifs des communications des fournisseurs de télécommunication et de services à valeur ajoutée. En raison de nombreuses années d’expérience, l'Organe de conciliation ne peut en principe pas supposer que tous ces enregistrements sont corrects et correspondent aux faits ou aux accords contractuels. Le client conteste l’activation de services supplémentaires fournis par A SA mais facturés par Y SA.

En l'espèce, Monsieur X a démontré de manière crédible avoir essayé de trouver un accord avec Y SA, sans succès.

Ainsi, les conditions de recevabilité étant remplies, l'Ombudsman est compétent pour traiter de l'affaire et tenter de trouver une solution amiable au différend qui lie les parties en cause.

D. CONSIDÉRATIONS DE L'OMBUDSMAN

1. Situation et problématique

Le présent litige repose sur le fait que Monsieur X conteste l’activation et la facturation de services supplémentaires qu’il n’a pas sollicités Il a précisé avoir commis une erreur avec sa télécommande mais qu’il n’a jamais souhaiter l’option de A SA.

Dès lors, l’Ombudsman tentera de déterminer la validité de l’activation de l’option de A SA et de la facturation en découlant.

2. Validité de l’activation de l’option de A SA

Monsieur X dispose d’un abonnement xxx auprès de Y SA. Malheureusement, l’Ombudsman ne détient pas de copie du contrat, ni d’indication sur les services souscrits. Dans tous les cas, Monsieur X bénéficie du service de télévision fourni par Y SA. Monsieur X ne conteste pas la validité du contrat xxx mais celle des options de télévision payantes ajoutée en février 2022 à son abonnement de base. Selon le client, il n’a nullement eu l’intention de conclure une option de télévision supplémentaire et payante en février 2022. De son côté, Y SA a soutenu que son client a activé l’option de A SA à CHF 55.- par mois, avec un crédit de CHF 16.- par mois, et ce, pour une durée minimale de 12 mois. Il s’avère que ce service a été commandé par deux fois par le biais de la télécommande du client. La première activation a eu lieu le 12 février 2022, par l’intermédiaire d’une personne mineure membre de la famille de Monsieur X. La seconde activation a eu lieu le 28 février 2022 par Monsieur X lui-même, mais par erreur. Même s’il ne s’agit que d’une option supplémentaire à l’abonnement xxx de Monsieur X, il s’agit d’un contrat. Selon l'article 1 alinéa 1 du Code des obligations (RS 220; ci-après CO), le contrat est parfait lorsque «les parties ont, réciproquement et d'une manière concordante, manifesté leur volonté». L’Ombudsman estime qu’il y a lieu de souligner que les points suivants constituent les éléments essentiels d'un contrat :

  • l'identification des parties, à savoir le client et le prestataire de services ;
  • le contenu du contrat, par exemple le type d’abonnement ;
  • le prix, qui doit être déterminé ou du moins déterminable, par exemple le prix de l'abonnement mensuel. Malheureusement, les deux contrats successifs ayant été vraisemblablement conclus depuis le poste de télévision de Monsieur X, l’Ombudsman ne dispose pas d’une copie. L’Ombudsman rappelle que la loi n’impose pas de forme. L’Ombudsman a essayé d’activer les services de A SA depuis un poste de télévision. Après avoir validé la chaîne, une information est apparue sur l’écran. Cette dernière mentionnait que la chaîne sélectionnée n’est pas comprise dans l’abonnement de base. Il a fallu cliquer sur la case « plus d’informations » pour avoir des explications plus concrètes, notamment le prix de l’option. Il était nécessaire de valider l’achat par la télécommande. L’Ombudsman remarque qu’il suffit de cliquer plusieurs fois sur « OK » avec une télécommande pour activer les services. Aucun mot de passe ou code n’est nécessaire à l’activation. Le prestataire a affirmé, dans sa prise de position, qu’un code peut être enregistré afin d’éviter l’activation non volontaire de services supplémentaires depuis le poste de télévision. L’Ombudsman est d’avis que la méthode utilisée dans le cas d’espèce par Y SA n’intègre pas de mesures de sécurité optimales pour le titulaire du contrat, dans le sens qu’un tiers ayant accès au poste de télévision du client pourrait activer des services supplémentaires sans l’accord du titulaire du contrat avec Y SA. Il est donc envisageable que les options supplémentaires payantes puissent être souscrites par une personne tierce, comme cela a été le cas le 12 février 2021 lors de la première activation. Monsieur X a reconnu avoir activé par erreur la même option en date du 28 février 2022 mais a immédiatement contacté A SA et Y SA pour faire part de son erreur. L’Ombudsman reconnaît que le client doit être attentif lorsqu’il utilise des services mais le prestataire aurait également pu renseigner Monsieur X sur la manière d’instaurer un code pour éviter une souscription non désirée avec la télécommande. Ceci est d’autant plus judicieux que Monsieur X est âgé de 84 ans et n’est pas forcément à l’aise avec les nouvelles technologies. Le Code des obligations ne prévoit en principe pas d’obligation d’information avant la conclusion d’un contrat. Toutefois, les parties en pourparlers doivent respecter l’obligation de bonne foi objective prévue à l’art. 2 al. 1 CO (ATF 108 II 305 consid. 2.d, JdT 1983 I 608). Ce principe général impose un devoir de renseigner le cocontractant à certaines conditions. L’existence et l’étendue du devoir d’information dépend des circonstances concrètes. Il faut notamment tenir compte de la nature du contrat, du déroulement des négociations ainsi que des intentions et des connaissances des parties impliquées. Un devoir d’information du professionnel vis-à-vis d’un consommateur n’existe que si quatre conditions cumulatives sont concrètement réunies:(cf. Carron Blaise, La protection du consommateur dans la conclusion d’un contrat, in : Carron Blaise/Müller Christoph (éd.), Droits de la consommation et de la distribution : les nouveaux défis, Neuchâtel 2013, p. 95 ss, p. 110s) :

1° Le professionnel détient ou devrait détenir l’information en question. 2° Le fait est inconnu du consommateur et celui-ci n’est pas censé le connaître. Le professionnel doit en outre pouvoir identifier ce déficit informationnel (caractère reconnaissable de l’ignorance). 3° Le professionnel sait ou devrait savoir que l’information est importante pour le consommateur (caractère reconnaissable de l’importance de l’information). 4° Le professionnel ne peut faire valoir un intérêt supérieur à celui du consommateur, qui l’autoriserait à conserver le secret.

Dans le cas d’espèce, il y a lieu de relever que client n’a pas eu la volonté de conclure un abonnement. Il apparaît également qu’il n’a pas compris avoir conclu un contrat supplémentaire sur le moment, ni qu’il en ait eu la volonté. Par contre, Monsieur X a immédiatement réagi lorsqu’il a pris connaissance de l’état de fait. Le contrat du 12 février 2022 a été annulé sans pénalité mais Y SA a refusé une résiliation immédiate et sans frais pour l’activation du 28 février 2022. L’Ombudsman estime qu’il ne s’agit même pas d’une erreur essentielle du contrat sur la base des articles 23 et suivant CO à mesure que le client ne s’est pas rendu compte qu’il pouvait conclure un contrat avec sa télécommande, ni même les avoir conclus. Ce n’est qu’à la réception de deux confirmations du 12 et du 28 février 2022 qu’il s’est rendu compte des deux activations de l’option de A SA.

Au vu de ce qui précède, l’Ombudsman est d’avis que le contrat du 28 février 2022 comprenant l’option de A SA » est nul et non avenu pour défaut de volonté de contracter par Monsieur X. L’Ombudsman propose l’annulation de la facturation en cours concernant les options de A SA sur le compte-client au nom de Monsieur X. Dans le cas où la présente proposition de conciliation a été exécutée totalement ou partiellement avant la signature des deux parties, l'accord est rempli en ces points. Dès lors, les droits et obligations en découlant s'éteignent.

E. PROPOSITION DE CONCILIATION

  1. Les parties prennent acte que le contrat du 28 février 2022 lié à l’option de A SA au nom de Monsieur X est nul et non avenu.
  2. Y SA annule toute facturation de l’option de A SA sur le compte client de Monsieur X, dans les dix jours suivant la réception de la présente convention dûment signée par les deux parties et par l’Ombudsman.
  3. Les parties acceptent la présente proposition de conciliation absolument sans contrainte.

Berne, le 24 mars 2022


Dr Oliver Sidler Ombudsman

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